Vu d’ailleurs : les Rencontres Européennes de la Participation à Rennes

La La Région Occitanie, le 12 décembre 2022

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Après s’être tenues à Amiens en 2021, les 6èmes Rencontres européennes de la participation se sont déroulées à Rennes. Ce sont plus de 1500 participants qui sont venus de toute la France, mais également d’Allemagne, de Suisse et de Belgique.    


Les Rencontres européennes de la participation citoyenne placent le futur de la démocratie au centre des débats : quelles méthodes pour lutter contre la désinformation et la défiance envers les institutions, et leur corollaire, la progression de l’abstention ? L’importance de partager, de débattre et de mettre en place des solutions pour préserver nos modèles démocratiques a réuni l’ensemble des participants.  Ces rencontres sont des lieux d’inspiration, où se déclinent des idées et des approches innovantes. Ainsi, depuis une dizaine d’années, le monde universitaire, politique, institutionnel, entrepreneurial, agit de façon très volontariste dans le domaine de la participation citoyenne. Ce réseau d’acteurs de la démocratie participative a donné naissance à l’association du Réseau national des budgets participatifs.


Les initiatives se multiplient, à toutes les échelles, pour recréer de la citoyenneté.


Rennes, ville pionnière, lance sa 6ème édition de budgets participatifs dont un budget participatif des enfants – où un dessin peut être une idée – et à venir une Fabrique citoyenne du Climat. La ville utilise les conseils de quartiers pour lancer des forums d’idées de quartier.  C’est la question centrale de ces Rencontres européennes 2022 : la participation : partout et pour tous ? Autrement dit, est-ce qu’il y a une échelle et un lieu pour pratiquer la démocratie participative ? Qu’en est-il de l’Europe ? Peut-on « faire Europe », en passant par des concertations à grande échelle, en trouvant des sujets communs ? La concertation et la transition écologique étaient également au cœur des discussions, avec notamment un débat intitulé « Le débat public sert-il la transition énergétique ? ». Et comment permettre à toutes et tous de s’emparer de la participation citoyenne, de ses outils et de ses espaces ?

Ainsi, afin de mieux accompagner les habitants dans les budgets participatifs, la ville de Rennes a mis en place un délai supplémentaire de 4 mois de co-construction avant le vote citoyen, pour passer du stade de l’idée au projet. Mais ces démarches s’adressent-elles vraiment au grand public, ne sont-elles pas limitées à quelques experts ? La Région Occitanie est venue témoigner d’une démarche adaptée à l’échelle de son territoire. Elle demeure à ce jour un cas unique de collectivité régionale ayant mis en place un budget participatif sur 13 départements, à destination de 6 millions d’habitants.    

Plus de soixante ateliers, conférences, visites sur site, ont permis de découvrir les différents visages que prennent aujourd’hui ces concertations et de faire un état des lieux de la participation. Des ateliers sur «  Comment articuler la participation à plusieurs échelles  », des partages d’expériences pour mieux comprendre «  Les spécificités de la concertation dans le monde rural  », étaient suivis d’un débat sur « La démocratie participative, un marché (pas) comme les autres ». La Wallonie est venue témoigner de ses démarches de concertation lors de L’atelier sur la concertation dans le monde rural, spécificités et principes méthodologiques. Sans concertation, pas de subvention de développement dans cette région francophone du sud de la Belgique. Les communes sont soutenues par une fondation qui depuis 40 ans les accompagne.  


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Mais, « l’information, ne serait-elle pas le plus gros défi de la participation ? »


Ce débat a fait émerger des outils concrets : sans être dans une communication descendante, mais en faisant travailler intelligemment et collectivement les citoyens. L’agence WedoData conseille de débuter avec l’information « la plus proche de chez soi », et rappelle que l’engagement et la participation démarrent souvent sur le pas de nos portes. Il s’agit de personnaliser l’information : inciter le citoyen à chercher la statistique qui le concerne, au lieu de le noyer dans des informations trop générales. L’autre levier d’appropriation de l’information par le citoyen est de partir de ce qu’il sait, pour arriver à ce que l’on souhaite atteindre. Il faut également s’appuyer sur des citoyens qui sont déjà engagés dans des initiatives puis agir par capillarité. Enfin, il faut avoir un rapport au savoir modeste, et avouer que l’on part tous de la même base. La communication dans la ruralité se fait autant via le numérique – qui touche plus de femmes et de jeunes – que les bulletins communaux, en passant par le bouche-à-oreille. Face à la fracture numérique et au manque de formation des élus-es,  les tiers-lieux sont des atouts qui mêlent culture et convivialité.  


Le complotisme ou l’importance de l’information dans la démocratie participative


Le déferlement d’informations non vérifiées est un véritable fléau. Cet atelier a mis en exergue la force des réseaux sociaux et les difficultés rencontrées pour lutter contre un complotisme de grande ampleur. Une des solutions présentées est « la probité, et de ne pas se lasser de transmettre et de faire circuler de vraies informations. » Redonner confiance dans la démocratie, c’est aussi se former sur différents dispositifs, comme la convention citoyenne. L’exemple allemand est inspirant : certaines communes, ou Länder, organisent une convention citoyenne tous les 4 ans, en 4 étapes : trois groupes formés respectivement de citoyens, de chercheurs et de lobbys, élaborent des préconisations, puis des scénarios à partir de ces préconisations, avant envoi au décideur qui doit obligatoirement faire un retour argumenté. L’Allemagne développe une grande énergie pour s’assurer une centaine de candidatures afin de former ces groupes : elle lance pas moins de 30 000 invitations et fait du porte-à-porte. Pour l’élu régional d’Occitanie en charge de la participation citoyenne, Olivier Romero Gayo, c’est bien la démonstration que la participation « est le seul et unique moyen de redonner confiance aux citoyens dans la politique. ».  


Au cœur de la participation dans la ville de Rennes


Des balades urbaines ont permis aux participants de rencontrer in situ les lauréats des budgets participatifs des villes de Chantepie, Saint-Jacques de la Lande et de Rennes.  


  • Le Quadri, village urbain d’innovations sociales et solidaires accueille les initiatives de l’ESS (économie sociale et solidaire). Ce bâtiment, de plus de 6500 m2, héberge une trentaine, d’associations, d’organismes de l’ESS. Cet immeuble, où travaillent environ 250 personnes, a été pensé comme un village de l’ESS, ouvert sur l’extérieur. La gouvernance du bâtiment est participative, chacune et chacun est partie prenante de de l’exploitation des espaces communs. Bâtiment ouvert sur l’extérieur et qui a pris dans son giron les habitants. L’inclusion est inhérente à son fonctionnement, puisque son premier étage est celui d’entreprises d’insertion professionnelle. Le Quadri a fait de la participation partout et pour tous son mode de vie. Des groupes de travail collaboratifs sont ouverts aux salariés comme aux habitants. Ces derniers peuvent proposer des programmations de spectacles pour le parvis qui se trouve à l’extérieur du bâtiment. La participation ici se décline au quotidien, à tous les étages, sous toutes ses formes, mais toujours traitée sous le prisme de l’ESS.  Ouvert en 2021, il a fallu neuf années de réflexion pour que le Quadri voit le jour et qu’il devienne un lieu emblématique de l’ESS en Bretagne.  

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  • Le tiers-lieu l’Hôtel Pasteur : un lieu capable d’accueillir et de répondre aux attentes de porteurs de projets éphémères . Dès sa conception, l’Hôtel Pasteur est participatif : cette ancienne faculté dentaire héberge une école maternelle, un Edulab pour les savoir pédagogiques et numériques, ainsi qu’un hôtel à projets pour tous. L’Hôtel Pasteur met à disposition ses espaces pour des projets éphémères : les résidences d’artistes ne dépassent pas 3 mois, mais doivent laisser trace de leur passage. Puisqu’ici tout se réinvente, mais rien ne disparaît vraiment, comme le réemploi systématique du mobilier. L’Edulab est animé par des médiateurs numériques qui accompagnent gratuitement des étudiants, retraités, associations, enseignants. Des badges progressifs les accompagnent, de l’initiation jusqu’à la transmission de compétences sur la culture numérique. L’Hôtel Pasteur, qui se présente comme un lieu « pour apprendre, faire et transmettre » a été sélectionné en 2018 parmi dix autres lieux comme modèle de projet participatif pour représenter la France lors de la biennale d’architecture à Venise. Pour en savoir plus 

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  • Le projet Tissage, pour « TrIptyque Science Société pour AgiR Ensemble  » déposé par les établissements universitaires de Rennes, crée les conditions du dialogue entre science et société à travers des dispositifs de participation citoyenne. En tissant des liens entre les citoyens, les chercheurs et journalistes et les décideurs, Tissage développe les compétences des participants à travers des formations ; met à disposition des ressources pour que naissent des projets de recherche participative ; met en place une plateforme de recherche participative pour faciliter la mise en relation des acteurs. Pour en savoir plus


 La plénière d’ouverture, La participation : partout et pour tous ?

Le débat grand public Crise écologique, réponses citoyennes ?

Photos © Julien Mignot

L’équipe la Région citoyenne