Lauréat budget participatif Climat : Dans l’Hérault, nettoyer les cours d’eau en canoë

La La Région Occitanie, dans Climat/biodiversité/ressources hors Arbres, le 12 juillet 2024

Herault1.jpg


À Montpellier, l’association Sentinelles de rivières, devenue en 2024 une Société Coopérative d’Intérêt Collectif (SCIC), embauche des personnes éloignées de l’emploi pour effectuer, en canoë-kayak, le ramassage des déchets dans les cours d’eau et entretenir les berges.


Lorsque Marie-Hélène Cocq était directrice des ressources humaines, elle avait une passion en dehors de son travail : le kayak, qu’elle pratiquait dans un club. « À portée de pagaie, on voyait des canettes, des bouteilles plastique, des emballages. Pour moi, ce n’était pas possible de laisser la rivière dans cet état alors en 2009, j’ai commencé à organiser ponctuellement des ramassages en mobilisant des amis kayakistes et un peu le grand public. »
La presse et les médias locaux s’intéressent à cette initiative, cela donne de la visibilité à ces kayakistes qui se préoccupent de la nature. Mais les arrivages de déchets étant incessants, Marie-Hélène prend conscience qu’il est nécessaire d’agir de manière professionnelle. Elle a déjà l’idée de permettre à des personnes en difficulté de se réinsérer à travers cette activité.
Quand elle prend sa retraite fin 2019, elle décide de créer une association et de monter des dossiers pour les budgets participatifs de la Région et du département de l’Hérault, qu’elle remporte l’un après l’autre. « C’est grâce à cela qu’on a pu se lancer. Le budget participatif de la Région a été une garantie vis-à-vis de financeurs. On a obtenu un prêt à taux zéro de France Active parce qu’on avait été reconnus comme projet viable par la Région. »


Une mission gratifiante

Sentinelles de rivières commence par encadrer des Tigistes, des personnes condamnées par la justice à des travaux d’intérêt général. « C’était très gratifiant pour eux parce que les passants les félicitaient. Pour des personnes qui sont en manque de confiance et qui ont besoin d’être resocialisées, c’est valorisant », explique la présidente.
L’association étant devenue entreprise d’insertion, un contrat avec la métropole de Montpellier a permis d’embaucher une première salariée en insertion en juin 2021. Aujourd’hui il y a deux encadrants et trois salariés, un réfugié, un demandeur d’asile et un senior ayant besoin de retrouver un cadre après un parcours chaotique.
L’organisme à but non lucratif ne concurrence pas les entreprises de nettoyage, au contraire il complète leur travail. « Les prestataires habituels ramassent les gros déchets mais nous, à bord de nos kayaks, comme on est au ras de l’eau, on s’attache à être très méticuleux, à ramasser le moindre paquet de cigarettes, les billes de polystyrène, tous les petits plastiques que ne voient pas les autres. Les entreprises classiques ont un impératif de productivité alors que nous, en tant qu’entreprise d’insertion, on peut prendre le temps de fignoler, de manucurer les berges. »

Un travail qui se voit

Savoir nager est une des conditions pour être recruté mais les salariés en insertion n’ont jamais fait de kayak. D’ailleurs, ils naviguent à deux sur des canoës, plus stables que les kayaks qui sont, eux, utilisés par des encadrants ayant l’habitude de diriger ces embarcations. Sur le Lez, l’itinéraire peut aller par exemple de l’Hôtel de ville jusqu’au marché du Lez ou au parc Rimbaud. Le reste du temps, les employés longent le Lez à pied, encadrés par un paysagiste spécialiste des berges qui leur enseigne comment entretenir une berge fragilisée par les crues et la consolider avec certains types de végétaux. Ils sont ainsi formés à l’entretien d’espaces verts, ce qui leur donne des compétences supplémentaires, l’objectif étant de les aider à trouver un emploi pérenne à la fin de leur contrat d’un an.
« Faire du canoë et évoluer dans la nature, c’est quand même très agréable, assure Marie-Hélène Cocq. Et lorsqu’un endroit est nettoyé de ses déchets, les salariés voient vraiment l’intérêt de leur mission et l’efficacité de leur travail. Les promeneurs et les poissons les remercient ! »

Vélos, caddies et plastique

Chaque matinée, l’équipe ramasse une remorque de 10 m³ de déchets : des vélos, des motos parfois, des caddies, de la ferraille, des canettes en pagaille et énormément de sachets et de bouteilles en plastique. Tout ce qui peut être récupéré et valorisé est amené en ressourcerie, la ferraille chez le ferrailleur, le verre dans les containers à verre.
« C’est important de montrer qu’on est là et qu’il ne faut pas laisser les déchets partir dans la rivière », insiste la responsable bénévole. « Les gens qui s’imaginent bien faire en jetant des déchets dans le caniveau ou une bouche d’égout ne réalisent pas que c’est une fausse bonne idée parce que dès qu’il pleut, ça déborde et ça revient dans les fossés pluviaux, donc dans les rivières puis le fleuve. On fait de la pédagogie avec les riverains : nos salariés en insertion portent aussi ces messages. »
Sentinelles de Rivières organise également des actions de sensibilisation avec les collèges, les lycées, les entreprises, la protection judiciaire de la jeunesse…
Marie-Hélène Cocq souhaite que son entreprise d’insertion reste à taille humaine pour bien accompagner ses salariés. En revanche, elle veut montrer que ce modèle est intéressant économiquement et ambitionne que d’autres s’en inspirent pour dupliquer ailleurs cette activité qui crée des emplois non délocalisables et fait du bien à l’environnement.

Site internet
Galerie photos

Le projet déposé : Lauréat du budget participatif Climat pour un montant de 50 000 €