Lauréat budget participatif : dans les Pyrénées-Orientales, planter un cœur pour la planète

La Région Occitanie, dans Environnement Climat, le 4 juillet 2025

Le cœur végétal en 2025 vu du ciel


À Torreilles, dans les Pyrénées-Orientales, une friche agricole a été transformée en une œuvre végétale gigantesque composée de 3000 plantations. Ce projet artistique et écologique, nommé Cœur de vie, a été initié par Anne-Isabelle Gaillard, portée par de fortes convictions environnementales.


En 2019, de nombreuses manifestations à travers le monde tentent d’alerter sur les répercussions du dérèglement climatique. « Je suivais tout cela avec beaucoup d’attention, se souvient Anne-Isabelle Gaillard. J’ai toujours été sensible aux questions environnementales, avec un intérêt particulier pour les projets de reforestation ». Son milieu d’origine et son entourage ont, selon elle, joué un rôle dans son engagement : sa mère était biologiste végétale, son ancien beau-père fut un pionnier du solaire en France et son conjoint, investi lui aussi dans le projet Cœur de vie, est un viticulteur mobilisé pour la protection du vivant. Avocate de métier, la quinquagénaire, aujourd’hui en invalidité, a également fait beaucoup de droit de l’environnement.


Le cœur, un symbole pour promouvoir le reboisement


Au moment où naît l’idée de Cœur de vie, Anne-Isabelle est propriétaire d’une terre agricole en friche à Torreilles, un héritage familial. Elle prend contact avec l’association La Haie Donneurs qui milite pour la réimplantation de haies bocagères et cherche des terrains sur lesquels planter. Ce contact en entraînant un autre, elle fait la connaissance de membres du collectif Citoyens pour le Climat 66 et, après une longue discussion de plusieurs heures, un projet se dessine : créer sur ces trois hectares une œuvre végétale visible du ciel.


« Je rêvais de planter sur ce terrain un immense cœur arboré, en résonance avec le cœur naturel de Voh situé dans la mangrove en Nouvelle-Calédonie, mondialement connu pour avoir été photographié par Yann Arthus-Bertrand. Le but était de montrer que l’homme est capable de réparer la planète, à l’instar des cœurs artificiels implantés chez les humains ».
Dans la foulée, Anne-Isabelle monte un dossier pour les budgets participatifs de la Région. « À l’époque, le slogan mis en avant, c’était : « Ensemble, on peut changer la donne ». Cette phrase me plaisait parce que je crois à la force du collectif ».


« Ce n’est pas juste une plantation, c’est un tableau vivant »


Une fois le projet lauréat, l’aventure peut commencer. Le challenge est énorme car tout est à créer. Sur les trois hectares de terrain, il ne reste qu’un massif de vieux cyprès, deux figuiers centenaires et un petit olivier de Bohême. Un géomètre transpose sur le terrain une aquarelle peinte par Anne-Isabelle. « On a calé chaque courbe du cœur, chaque ligne d’arbres, comme un artiste construit son œuvre », explique-t-elle. Le cœur occupe 4 500 m², avec deux lignes principales d’arbres : 66 frênes à fleurs pour la bordure, 44 oliviers pour le tracé intérieur. Une troisième ligne vient enrichir l’ensemble.


Le projet est bien plus qu’esthétique. Il répond à un enjeu écologique majeur. « Nous sommes dans une région marquée par la déprise agricole. Et les rares forêts qu’il reste, souvent des monocultures de pins, sont très vulnérables. De plus, les pins n’ont pas le même intérêt que les feuillus dans le cycle d’évaporation de l’eau. Planter une grande diversité d’essences est une forme de résilience ».


On trouve donc ici des aulnes, des érables, mais aussi des espèces comme le pacanier – qui donne les noix de pécan -, le cormier, l’arbousier ou le néflier. L’objectif était de créer une forêt comestible, à la fois utile, éducative et autonome. Un soin particulier a été porté à l’irrigation, rendue difficile par l’état de la nappe phréatique. « Nous avons creusé des cuvettes de plantation remplies de broyat végétal pour retenir l’humidité. Nous avons tout fait pour garantir l’autonomie des arbres, même dans un sol salé et peu fertile ».


L’homme au service de la nature


Cœur de vie est aussi une aventure sociale et inclusive. Les plantations ont été confiées à l’ESAT (établissement ou service d’aide par le travail) Joseph-Sauvy, spécialisé dans les espaces verts. « Je voulais montrer que chacun peut faire un geste pour la planète, même en situation de handicap », revendique Anne-Isabelle. Deux grands événements citoyens ont aussi permis à des bénévoles de participer aux plantations. « Quand on a planté les oliviers, il y avait beaucoup de monde ».


Aujourd’hui, 3000 arbres et arbustes ont été plantés et le cœur est bien visible depuis le ciel. Les résultats sont parfois surprenants. « Les frênes à fleurs font déjà 2,50 mètres, certains érables dépassent les 4 mètres… mais les pacaniers ont mis trois ans à décoller ! Cette année, enfin, ils se sont lancés. C’est la magie du vivant ».


La forêt comestible est désormais un outil pédagogique et elle demeure le témoignage durable d’une mobilisation collective. Des bénévoles sont toujours recherchés pour l’entretien du terrain et l’organisation de visites. Cet été, trois visites sont programmées entre le 22 juillet et le 12 août, associées à des ateliers artistiques sur le végétal.


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Lauréat du budget participatif "Vos solutions pour le climat en février 2020" pour un montant de 150 000 €