Dans l’Aude, un four solidaire multifonctions

La Région Occitanie, dans Climat/biodiversité/ressources hors Arbres, le 22 décembre 2025

À Luc-sur-Aude, l’association Causes communes 11 s’apprête à construire un concentrateur solaire unique en France, capable d’atteindre des températures dépassant les 1000°C pour alimenter des ateliers de ferronnerie, de poterie et de soufflage de verre. Ce projet un peu fou a aussi une visée scientifique.


Et si la transition écologique passait par une loupe géante ? Imaginez une parabole de 30 m² de miroirs qui concentre les rayons du soleil en un point précis, jusqu’à faire monter la température à plus de 1000°C. Ce n’est pas de la science-fiction mais le projet concret que porte l’association Causes communes 11 à Luc-sur-Aude. « Vous voyez quand on met une petite loupe sur sa main, ou sur une feuille, et que ça brûle ? Là, c’est exactement le même principe, en beaucoup plus grand  », explique Michaël Dif, président de l’association. « Ce seront 288 miroirs qui renverront tous les rayons sur une zone de 8 cm de diamètre. »


Premier objectif : alimenter trois ateliers d’artisans en énergie 100 % solaire, 200 jours par an. « On ne transforme pas la chaleur en électricité, on l’utilise directement, précise Michaël. C’est un rendement excellent, avec très peu de déperdition, contrairement au solaire photovoltaïque qui transforme seulement 30 % de l’énergie solaire en électricité ». Ce concentrateur solaire est inspiré de technologies oubliées depuis le XIXe siècle. « Il y a 150 ans, Augustin Mouchot avait déjà construit des concentrateurs solaires pour faire tourner des imprimeries ou pomper de l’eau. »


Une idée née d’une balade


Tout a commencé il y a 18 ans, quand Michaël Dif découvre le four solaire de Mont-Louis. «  Je me souviens être sorti en me demandant : pourquoi n’y a-t-il pas un concentrateur comme ça tous les dix kilomètres dans le sud de la France ? »


Quelques années plus tard, il tombe sur le livre de Luc Dando, ingénieur spécialiste des fours solaires, « Vers une éco-industrie locale ». « J’ai été passionné par son approche. Je l’ai contacté, et quand on a monté Causes communes 11 en 2020, tout s’est enchaîné  ». L’association, créée au départ pour financer des projets de transition écologique via des micro-dons, décide de monter son propre projet de concentrateur solaire. « On avait la structure juridique pour être maître d’ouvrage, et Luc Dando avait l’expertise. C’était l’occasion de montrer que cette technologie est fonctionnelle, pertinente et reproductible  ».


Retenu dans le cadre des budgets participatifs de la Région, le projet est lauréat en janvier 2024. « Sans ce soutien, on n’aurait jamais pu démarrer, reconnaît Michaël Dif. Et ça nous donne une crédibilité pour trouver d’autres financements. »


Une énergie pour le futur


Le début du projet a été décalé car le terrain mis à disposition par la mairie n’était pas constructible. Pour le transformer en zone artisanale, le Plan Local d’Urbanisme (PLU) a dû être modifié, ce qui n’a été acté qu’en octobre 2025. Entre temps, l’équipe a pu avancer sur les études. Le concentrateur sera utilisé 50 jours par an par chaque artisan (forge, poterie, soufflage de verre), les 50 jours restants seront dédiés à la recherche. « On est en contact avec un laboratoire du CNRS et l’école des mines d’Albi, qui sont très intéressés pour venir faire des mesures parce qu’ils n’ont pas de données sur des systèmes tels que le nôtre.  »


Le concentrateur de Luc-sur-Aude sera le premier en France utilisé pour l’artisanat. Mais les applications potentielles sont nombreuses. « La coopérative agricole de Limoux aimerait faire des tests avec ce concentrateur pour sécher des résidus de vinification et les déshydrater. Un centre de recyclage à Lézignan récupère des bouchons de bouteilles plastique : transformer ce plastique nécessite une température très élevée. On peut également cuire des aliments ou chauffer de l’eau comme le fait déjà un restaurant à Marseille, avec deux grandes paraboles solaires qui fonctionnent quasiment 300 jours par an. »


Un appel aux citoyens pour boucler le budget


Les membres de l’association croient vraiment aux potentialités de leur projet. «  L’idée, c’est de remettre cette énergie au cœur des usages quotidiens  », insiste Michaël. « Le soleil est abondant, non polluant, gratuit… et on l’utilise si peu !  »


Toutes les données techniques seront mises à disposition sous licence libre. « On ne veut pas que des industriels s’approprient cette technologie  ». Le permis de construire devrait être déposé d’ici avril 2026. « Ensuite, on attaquera le terrassement et la construction. La fabrication des 288 miroirs prendra huit à neuf mois. On espère inaugurer en juin 2027.  »


Mais avec un coût prévisionnel d’environ 300 000 €, ils cherchent encore des fonds. Une campagne de financement participatif est en cours jusqu’au 23 janvier. « Chaque euro donné compte ! », rappelle le président. Alors si vous aussi, vous êtes enthousiasmé par ce projet de concentrateur solaire, cliquez sur le lien pour les aider.  



Lien vers la page dédiée au projet


Lien vers la plateforme de financement participatif


Lauréat du budget participatif Ma solution pour le climat et l’alimentation en février 2024 pour un montant de 150 000 €