Lauréat budget participatif : Dans le Tarn-et-Garonne, une pépinière associative pionnière
L’association Campagnes Vivantes 82 a inauguré le 15 octobre dernier, à Castelsarrasin dans le Tarn-et-Garonne, la première pépinière associative française destinée à produire de jeunes plants d’arbres champêtres d’essences locales, afin de développer la replantation de haies sur les terres agricoles du département.
À partir du milieu des années 50, l’agriculture française a fait l’objet d’une politique de remembrement : les parcelles agricoles ont été réorganisées pour augmenter la productivité, les haies et les bosquets étant arrachés pour permettre le passage des tracteurs et faciliter la mécanisation. « Cette dynamique a conduit à un arrachage très conséquent de haies implantées depuis des centaines d’années », déplore Vincent Rif, coordinateur de l’association Campagnes Vivantes 82.
Constatant la dégradation du paysage et l’effondrement de la biodiversité provoqués par la disparition des haies, des agriculteurs se sont mobilisés contre cette logique. Et c’est un collectif d’agriculteurs qui a créé, en 1992, l’association Campagnes Vivantes 82, pour accompagner la replantation de haies champêtres dans le sud du Tarn-et-Garonne.
Ironie de l’histoire : alors que dans les années 60 et 70, la politique agricole commune (PAC) subventionnait les agriculteurs pour arracher les haies, aujourd’hui elle les finance pour les protéger et en replanter.
Accompagner la replantation des haies
Les activités de l’association se sont étendues et diversifiées, notamment avec le soutien de la Région Occitanie. « On ne travaille plus seulement avec des agriculteurs mais aussi avec des collectivités territoriales, des particuliers, des syndicats, des associations environnementales, tous types d’organismes ou de personnes qui souhaitent planter des arbres champêtres », énumère Vincent Rif. Campagnes Vivantes 82 fait partie d’un réseau : une association opératrice de l’arbre champêtre est présente dans chaque département d’Occitanie.
Le principal programme porté par l’association s’appelle Plantem, qui signifie « plantons » en occitan. « On conseille et on accompagne tous les porteurs de projets. On peut fournir des jeunes plants champêtres, du paillage, toutes les protections nécessaires pour que la plantation se passe au mieux. Et après, on suit l’évolution des plantations sur plusieurs années. »
L’association mène également des actions de sensibilisation auprès de tous les publics, notamment les scolaires, sur les enjeux liés à la haie champêtre.
Les haies, un atout pour l’environnement
Les haies champêtres stockent du carbone et sont nécessaires pour la biodiversité qui est utile en agriculture. Avec la replantation des haies, insectes, petits animaux, oiseaux reviennent. « C’est aussi pour cette raison que des fédérations de chasseurs sont des partenaires techniques et financiers de l’association depuis sa création. Les haies recréent un écosystème, cela ramène de petits gibiers qui alimentent les plus gros, explique le coordinateur. Par exemple, les haies sont des refuges pour la perdrix grise. Sans haies champêtres, il n’y a plus de perdrix. »
Au-delà de la biodiversité, planter des haies champêtres est l’un des meilleurs atouts contre les risques environnementaux, notamment les inondations. « C’est l’une des solutions les plus simples pour réguler le cycle de l’eau, argumente Vincent Rif. En retenant les sols, les haies permettent que l’eau s’infiltre de façon plus fluide. Elles maintiennent aussi les talus et évitent qu’ils ne débordent sur les routes : ce sont des enjeux économiques importants pour les petites collectivités territoriales qui doivent entretenir le réseau routier. »
Engouement du public et forte demande
L’un des fondements de l’association est de planter des essences locales tels que le sureau, cornouiller, érable champêtre, fusain, alisier, avec des graines récoltées directement dans la zone où les arbustes seront replantés.
Depuis 2018, la marque Végétal Local certifie l’origine des jeunes plants achetés en pépinière.
Campagnes Vivantes 82 récolte aussi elle-même des graines dans la nature, les retravaille pour les rendre propres à la production et les confie à des pépinières qui les font pousser pendant une ou deux années. 50 % des plants fournis par Campagnes Vivantes 82 à ses adhérents sont ainsi certifiés Végétal Local.
Mais la démarche de replantation de haies est victime de son succès. « Il y a un gros engouement en ce moment autour de l’arbre et de la haie champêtre, la demande est trop forte et il est impossible de s’approvisionner localement. Nous étions obligés de proposer des essences issues au mieux d’autres régions de France, voire de l’étranger, parce que dans certains cas, il n’y a plus de fournisseurs en France. »
Créer le circuit-court de l’arbre champêtre
Face à cette pénurie, une idée a germé au sein de l’équipe : pourquoi ne pas créer une activité de pépinière pour combler la demande et participer à une dynamique globale de circuit-court des arbres champêtres ? Un projet incluant un aspect de mutualisation régionale avec deux associations du réseau, Arbres et Paysages d’Autan (31) et Arbre et Paysage 32.
« Il y a eu un alignement de planètes parce que le budget participatif de la Région est sorti à peu près à ce moment-là », se souvient Vincent Rif. « L’appel à projets proposait un focus intitulé « auprès de mon arbre », ça ne pouvait pas mieux tomber. De plus, la mobilisation citoyenne était consubstantielle à notre projet, porté par les bénévoles et les adhérents de l’association. Et cela nous permettait de sensibiliser encore une fois le grand public à la problématique du végétal local. »
Tout s’est bien enchaîné : la signature d’un bail avec un adhérent qui a mis à disposition un hectare de terre, le montage d’une première serre – d’autres sont prévues –, le lancement de la production avec l’objectif de sortir d’abord 7500 plants, et pour finir l’inauguration de la pépinière associative le 15 octobre.
« Tous les adhérents qui ont porté un programme de plantation cette année pourront avoir, parmi les plants qui lui seront fournis par l’association, de jeunes plants issus de notre pépinière associative », s’enorgueillit le coordinateur. « Notre intention est, à terme, d’arriver à un équilibre financier : pour cela, nous devons produire 30 à 35000 plants par an. Les résultats sont encourageants, nous sommes confiants. »
Site internet :
https://campagnesvivantes82.fr
Réseaux sociaux :
https://www.facebook.com/profile.php?id=100068801812821
Lauréat du budget participatif Climat et Alimentation 2023 en février 2024 pour un montant de 85 000 €