En Haute-Garonne, transmettre l’histoire de la fraternité occitane

La Région Occitanie, dans Solidarités santé et égalités et Citoyenneté et démocratie, le 27 novembre 2025

Partir de l’histoire de l’Occitanie pour parler de l’antisémitisme, du racisme et de la fraternité : c’était l’objectif de l’association Les Militants des Savoirs à travers le projet Terres Fraternelles. Défi relevé avec une exposition qui tourne déjà dans la région, ainsi qu’un livre et une bande dessinée sortis il y a quelques mois.



Pour Séraphin Alava, professeur émérite en sciences de l’éducation à l’université Toulouse Jean Jaurès et président de l’association Les Militants des Savoirs, l’histoire ne doit pas rester cantonnée sur les campus, elle doit être accessible à tous car elle permet de mieux comprendre le monde et de contrer les stéréotypes véhiculés par le racisme et l’antisémitisme.


Le projet Terres fraternelles est né d’un désir, celui de raconter une histoire de l’Occitanie à travers les comportements justes et les éléments fraternels. « Regardons les choses positives, nous ne nous enfermons pas dans le négatif », s’exclame le professeur. Aidé d’une une quinzaine d’historiens, il a donc compilé des récits de fraternité, des actes de résistance, des postures de courage qui ont jalonné notre histoire régionale. Comme les 494 Justes d’Occitanie, ces femmes et ces hommes qui, pendant la Seconde Guerre mondiale, ont sauvé des juifs, des résistants, des persécutés.


L’Occitanie, terre de métissage et d’entraide


«  Notre région est un carrefour. Elle a vu passer quasiment toutes les populations et elle ne peut pas se comprendre sans ce flux : méditerranéen, pyrénéen, atlantique, américain… Ces populations se sont croisées, aidées et des valeurs universelles ont émergé  ». Séraphin Alava le répète : l’Occitanie est un territoire façonné par les migrations, les échanges et les gestes de solidarité. Un héritage souvent oublié, parfois volontairement caché, que ce projet a voulu mettre en lumière. Cela remonte à très loin. «  Les paléontologues ont démontré que déjà, à l’époque des Aurignaciens, les hommes s’entraidaient. Ils ont constaté que des os fracturés de personnes blessées ont pu se ressouder grâce à des soins prodigués par leurs congénères. La loi du plus fort n’a jamais été la seule règle.  »


Pour rappeler que l’Occitanie a souvent été en avance sur son temps en matière de fraternité et de résistance, le professeur relate un fait historique de 1453. « Quand un esclave entrait dans Toulouse, il devenait un homme libre. Le roi de Catalogne a attaqué cette décision devant le roi de France, mais les Toulousains ont tenu bon. C’est un symbole fort : ici, on a aboli l’esclavage bien avant les autres ». L’Occitanie, c’est aussi la région où musulmans et juifs ont collaboré pour faire rayonner la médecine et la science à Montpellier. « Sans cette coopération, l’université de Montpellier n’aurait pas la même renommée », souligne-t-il. 


Une BD et une exposition comme outils pédagogiques


À partir du livre rédigé par les historiens, des éléments ont été extraits pour créer des panneaux d’exposition. La bande dessinée se concentre sur le sauvetage des enfants juifs à Moissac. Elle a été financée grâce aux budgets participatifs de la Région – tout comme l’exposition – et une subvention complémentaire de la DILCRA (Délégation interministérielle à la lutte contre le racisme, l’antisémitisme et la haine anti-LGBT). L’association Les Militants des Savoirs a travaillé avec l’Office National des Anciens Combattants (ONAC), l’association Hebraïca et le consistoire de Montpellier pour rassembler des archives et rendre cette histoire vivante, avec la volonté de s’adresser aux jeunes, « de leur montrer que l’histoire n’est pas qu’une suite de guerres et de conflits. »


L’exposition a été présentée au Mémorial de Rivesaltes et dans les maisons de la Région. L’association souhaite qu’elle circule le plus possible, dans les mairies, les médiathèques…  Elle a été conçue pour être modulable. « Les collèges et lycées peuvent choisir les panneaux qui les intéressent selon la période de l’histoire qu’ils veulent cibler : Révolution française, Seconde Guerre mondiale, décolonisation… » Et pour l’accompagner, Séraphin Alava propose des débats avec un historien.


Face aux discours de haine, l’urgence d’agir


« On a souvent présenté la diversité comme un problème. Or, l’Occitanie prouve le contraire. Aujourd’hui, les discours de rejet de l’étranger infusent partout, les fake news circulent sans contrôle  ». Séraphin Alava est inquiet, mais déterminé : «  Il faut des outils pour informer, pour rappeler que la fraternité a toujours existé  ».  Le projet Terres Fraternelles s’attache à valoriser les gestes qui unissent, pas ceux qui divisent. « Plus on en parlera, plus les jeunes comprendront que la solidarité est une force.  »      



Lien vers l’exposition : https://terresfraternelles.fr


Le livre « Terres fraternelles, chemins d’Occitanie » : https://www.loubatieres.fr/?p=6593  


La bande dessinée « La maison des enfants » : https://www.editionspleinvent.fr/product/128913/la-maison-des-enfants/      


Lauréat du budget participatif Mieux vivre ensemble en octobre 2021 pour un montant de 35 000 €